15 décembre 2021

Contrat de collaboration libérale et assujettissement à la TVA en Polynésie française

Me Grégory D'Angela

La Polynésie française est une destination de rêve mais ce n’est pas un paradis fiscal. Comme en Métropole, l’exercice d’une activité économique peut y être soumise à la TVA en application du code des impôts de la Polynésie française.

A cet égard, le Conseil d’Etat vient de rappeler que le fait pour un chirurgien-dentiste de mettre à la disposition d’un confrère chirurgien-dentiste, dans le cadre d’un contrat de collaboration libérale, une partie de sa patientèle ainsi que des locaux et du matériel en contrepartie du reversement par ce dernier d’un pourcentage de ses honoraires constitue une prestation de services imposable à la taxe sur la valeur ajoutée (CE 13 décembre 2021, req. n° 431151, publié aux Tables).

Le Conseil d’Etat avait déjà rendu des décisions identiques concernant des prestations de services similaires rendues en Métropole dans le cadre de contrats de collaboration libérale.

 

Collaboration libérale et imposition à la TVA en Métropole

La loi n° 2005-882 du 2 août 2005 en faveur des PME a officialisé la possibilité pour les membres des professions de santé d’exercer leur profession en qualité de collaborateur libéral d’un autre professionnel.

Le contrat de collaboration libérale qui est conclu par les professionnels de santé prévoit généralement que le titulaire du Cabinet offre à son collaborateur une partie de sa patientèle et met à sa disposition une partie des locaux et du matériel afin qu’il puisse exercer sa profession en toute indépendance et sous sa propre responsabilité. En contrepartie, le collaborateur, qui est rémunéré par les patients, reverse au titulaire du Cabinet un pourcentage de ses honoraires dénommé « redevance ».

Le Conseil d’Etat a jugé à de multiples reprises que cette redevance constitue la rémunération d’une prestation de services imposable à la TVA (cf. notamment : CE 5 mars 1993 Donnot, req. n° 121980, publié aux Tables).

 Le titulaire du Cabinet doit ainsi impérativement reverser au Trésor public la TVA collectée sur les redevances qu’il perçoit de son collaborateur.

 

Collaboration libérale et absence d’exonération de TVA en Polynésie française

Il en va de même en Polynésie française, comme l’a rappelé le Conseil d’Etat dans sa décision précitée du 13 décembre 2021 (CE 13 décembre 2021, req. n° 431151, publié aux Tables).

La question était toutefois plus délicate s’agissant de ce territoire ultra-marin car l’article 340-1 du code des impôts de la Polynésie française prévoit l’exonération de la « location d’un local équipé à usage professionnel ».

Le titulaire d’un Cabinet qui conclut avec un collaborateur un contrat de collaboration libérale ne peut-il pas bénéficier de cette exonération dans la mesure où il met à la disposition de ce dernier un local équipé afin qu’il puisse exercer sa profession ?

Le Conseil d’Etat a jugé que le titulaire du Cabinet ne saurait se prévaloir de cette exonération car la mise à la disposition du collaborateur d’un local équipé à usage professionnel ne peut s’analyser en une « location » de ce local.

Une telle solution repose sur le fait qu’une location confère nécessairement au preneur la jouissance exclusive des locaux et des équipements qu’il comporte. Or, à la différence d’un preneur à bail, le collaborateur ne bénéficie pas d’une jouissance exclusive du local mis à sa disposition. En effet, il doit le partager avec le titulaire du Cabinet.

Il résulte de ces éléments que le titulaire du Cabinet réalise une opération imposable à la TVA qui ne peut pas bénéficier de l’exonération prévue à l’article 340-1 du code des impôts de la Polynésie française. Comme en Métropole, il doit ainsi impérativement reverser au Trésor public la TVA collectée sur les redevances qu’il perçoit de son collaborateur.

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