13 juin 2022

Fiscalité France Nouvelle-Zélande : retenue à la source sur les redevances

Me Grégory D'Angela

Les redevances de source française dont le bénéficiaire effectif réside en Nouvelle-Zélande mais qui sont versées à un intermédiaire établi dans un Etat tiers peuvent-elles être soumises à la retenue à la source prévue au paragraphe 2 de l’article 12 de la convention fiscale franco-néo-zélandaise du 30 novembre 1979, alors qu’il existe déjà une convention fiscale entre la France et l’Etat tiers où est établi l’intermédiaire ?

Dans une décision du 20 mai 2022 (CE 20 mai 2022 Société Planet, req. n° 444451, publié aux Tables), le Conseil d’Etat a donné une réponse positive :

« Eu égard à leur objet, et telles qu’elles sont éclairées par les commentaires formulés par le comité fiscal de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) sur l’article 12 de la convention-modèle établie par cette organisation publiés le 11 avril 1977, et ainsi d’ailleurs qu’il résulte des mêmes commentaires publiés respectivement les 23 octobre 1997, 28 janvier 2003 et 15 juillet 2014 et en dernier lieu le 21 novembre 2017, les stipulations du 2 de l’article 12 de la convention fiscale franco-néo-zélandaise sont applicables aux redevances de source française dont le bénéficiaire effectif réside en Nouvelle-Zélande, quand bien même elles auraient été versées à un intermédiaire établi dans un Etat tiers ».

 

Données du litige fiscal

La société requérante, la société Planet, est une société française établie à Aix-en-Provence.

Son activité consiste à distribuer aux clubs de fitness des programmes sportifs de la marque « Les Mills », conçus par la société Les Mills International LTD établie en Nouvelle-Zélande.

Dans ce cadre, la société Planet a conclu en 1998 un contrat d’agence avec la société Les Mills International LTD en vertu duquel elle collecte les frais de licence acquittés par les clubs de fitness puis reverse à la société Les Mills International LTD une redevance mensuelle correspondant à 30 % de ces frais.

Cependant, au lieu d’être payées directement à la société Les Mills International LTD établie en Nouvelle-Zélande, les redevances ont été versées à des intermédiaires contrôlés par le gérant de la société Planet :

  • la société Les Mills Belgium SPRL établie en Belgique pour 2011
  • et la société Les Mills Euromed Limited établie à Malte pour 2012.

A la suite d’une vérification de comptabilité, l’administration fiscale a soumis les redevances versées par la société Planet à la retenue à la source au taux de 10 % prévue au paragraphe 2 de l’article 12 de la convention fiscale du 30 novembre 1979 entre la France et la Nouvelle-Zélande.

 

Solution du litige fiscal

L’article 12 de la convention fiscale du 30 novembre 1979 entre la France et la Nouvelle-Zélande en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion fiscale en matière d’impôts sur le revenu stipule que :

« 1. Les redevances provenant d’un Etat et payées à un résident de l’autre Etat sont imposables dans cet autre Etat.

2. Toutefois, ces redevances sont aussi imposables dans l’Etat d’où elles proviennent et selon la législation de cet Etat, mais si la personne qui reçoit les redevances en est le bénéficiaire effectif l’impôt ainsi établi ne peut excéder 10 p. cent du montant brut des redevances.

3. Le terme ” redevances ” employé dans le présent article désigne les rémunérations de toute nature payées pour l’usage ou la concession de l’usage d’un droit d’auteur sur une oeuvre littéraire, artistique ou scientifique, y compris les films cinématographiques et les oeuvres enregistrées pour la radiodiffusion ou la télévision, d’un brevet, d’une marque de fabrique ou de commerce, d’un dessin ou d’un modèle, d’un plan, d’une formule ou d’un procédé secrets, ainsi que pour l’usage ou la concession de l’usage d’un équipement industriel, commercial ou scientifique et pour des informations ayant trait à une expérience acquise dans le domaine industriel, commercial ou scientifique ».

Il résulte de cet article que :

  • L’Etat où réside la personne qui perçoit la redevance est compétent pour l’imposer (paragraphe 1)
  • L’Etat à partir duquel est versée la redevance est également compétent pour imposer la partie versante (paragraphe 2). Toutefois, cet impôt est plafonné à 10 % du montant brut versé lorsque la personne qui perçoit la redevance en est également le bénéficiaire effectif.

Ainsi, lorsqu’une redevance de source française est payée à un bénéficiaire effectif résidant en Nouvelle-Zélande, la Nouvelle-Zélande peut soumettre ce bénéficiaire effectif à l’impôt. De son côté, la France peut soumettre la partie versante à une retenue à la source plafonnée à 10 % du montant brut de la redevance.

Qu’en est-il lorsque la redevance de source française est versée à une personne établie dans un Etat tiers alors que son bénéficiaire effectif réside en Nouvelle-Zélande ? Peut-on, comme l’a fait l’administration fiscale française, appliquer la convention fiscale franco-néo-zélandaise et soumettre la partie versante à la retenue à la source de 10 % alors même que le bénéficiaire effectif n’est pas celui qui perçoit la redevance ?

Dans sa décision précitée du 20 mai 2022 (CE 20 mai 2022 Société Planet, req. n° 444451, publié aux Tables), le Conseil d’Etat a donné une réponse positive après s’être appuyé sur les « commentaires formulés par le comité fiscal de l’Organisation pour la coopération et le développement économique (OCDE) sur l’article 12 de la convention-modèle établie par cette organisation publiés le 11 avril 1977 ».

Dans cette situation, il est possible de faire abstraction de la convention fiscale conclue entre la France et l’Etat de résidence de la partie ayant perçu la redevance et de n’appliquer que la convention fiscale conclue entre la France et l’Etat de résidence du bénéficiaire effectif de la redevance.

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