29 décembre 2020

Régime fiscal des impatriés : option pour l’exonération à hauteur de 30 % de la rémunération

Me Grégory D'Angela

Un salarié travaillant en France pour la filiale française d’une grande banque peut-il, après avoir travaillé au Royaume-Uni pour sa filiale britannique, opter, dans le cadre du régime fiscal des impatriés prévu à l’article 155 B du code général des impôts (CGI), pour l’exonération d’impôt sur le revenu à hauteur de 30 % de l’ensemble de sa rémunération ?

Le Conseil d’Etat a rappelé dans une décision très récente du 22 décembre 2020 concernant un salarié de la banque HSBC (CE 22 décembre 2020, req. n° 427536, publié aux Tables) que, pour répondre à cette question, le régime fiscal des impatriés commande d’opérer, s’agissant des prises de fonctions antérieures au 16 novembre 2018, une distinction entre, d’une part, les salariés appelés par l’intermédiaire d’une entreprise établie à l’étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France et, d’autre part, les salariés appelés directement par une entreprise établie en France, dès lors que seuls ces derniers peuvent bénéficier de l’option susvisée :

« Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 4 août 2008 de modernisation de l’économie de laquelle elles sont issues, que seules les personnes recrutées directement à l’étranger par une entreprise installée en France et non les personnes effectuant une mobilité entre entités d’un même groupe peuvent bénéficier, sur option, de l’exonération d’imposition forfaitaire de 30 % de leur rémunération ».

 

L’évolution du régime fiscal des impatriés

Tous les salariés impatriés ne sont pas logés à la même enseigne fiscale. Ou plutôt ne l’étaient pas.

Pour les prises de fonctions antérieures au 16 novembre 2018, il convient d’opérer une distinction entre, d’une part, les salariés appelés par l’intermédiaire d’une entreprise établie à l’étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France et, d’autre part, les salariés appelés directement par une entreprise établie en France.

Une telle distinction entre ces deux catégories de salariés impatriés s’impose dans la mesure où ils ne bénéficient pas des mêmes avantages fiscaux. En effet, les salariés appelés par l’intermédiaire d’une entreprise établie à l’étranger à occuper un emploi dans une entreprise établie en France bénéficient seulement de l’exonération d’impôt sur le revenu de la prime d’impatriation. Au contraire, les salariés appelés directement par une entreprise établie en France bénéficient soit de l’exonération d’impôt sur le revenu de la prime d’impatriation, soit, si cela s’avère plus avantageux, de la possibilité d’opter pour l’exonération à hauteur de 30 % de l’ensemble de leur rémunération.

La loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 portant loi de finances pour 2019 a modifié le régime fiscal des impatriés. Elle a supprimé la distinction entre ces deux catégories de salariés impatriés et, par voie de conséquence, a unifié les avantages fiscaux dont peuvent bénéficier les salariés impatriés. Désormais, tous les salariés impatriés peuvent bénéficier soit de l’exonération d’impôt sur le revenu de la prime d’impatriation, soit, si cela s’avère plus avantageux, de la possibilité d’opter pour l’exonération à hauteur de 30 % de l’ensemble de leur rémunération.

 

Données du litige fiscal

Après avoir vécu plus de 20 ans au Royaume-Uni où il était salarié de la banque HSBC Royaume-Uni, le requérant a rejoint la société HSBC à compter du 1er mars 2010 (soit bien avant l’entrée en vigueur de la réforme opérée par la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 portant loi de finances pour 2019). Considérant avoir été recruté directement par HSBC France, il a opté pour l’exonération d’impôt sur le revenu à hauteur de 30 % de l’ensemble de sa rémunération.

L’administration fiscale a estimé, au contraire, que le requérant avait été recruté par l’intermédiaire de la banque HSBC Royaume-Uni et que, de ce fait, il ne pouvait pas opter pour l’exonération d’impôt sur le revenu à hauteur de 30 % de l’ensemble de sa rémunération. En conséquence, elle lui a adressé une rectification fiscale et l’a assujetti à des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu.

 

Solution du litige fiscal

Dans sa décision précitée du 22 décembre 2020 (CE 22 décembre 2020, req. n° 427536, publié aux Tables), le Conseil d’Etat a donné gain de cause à l’administration fiscale, considérant que le requérant avait bien été recruté par l’intermédiaire de HSBC Royaume-Uni et non directement par HSBC France :

« 3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que si M. A… a rompu tout lien juridique avec la société HSBC UK avant de conclure un contrat à durée indéterminée avec la société HSBC France, il a néanmoins continué à travailler au sein du même groupe, a bénéficié, lors de son embauche en France, d’une dispense de période d’essai ainsi que de la reprise intégrale de son ancienneté dans le groupe et s’est d’ailleurs lui-même prévalu, dans un courrier adressé le 26 mai 2014 à l’administration fiscale, d’avoir fait l’objet d’une mobilité intra-groupe. Il s’ensuit qu’en jugeant que M. A… avait fait l’objet d’un recrutement direct à l’étranger par une entreprise établie en France et pouvait, en conséquence, bénéficier de l’option en faveur de l’exonération forfaitaire d’imposition de sa rémunération prévue par l’article 155 B du code général des impôts, cité au point 2, alors que son embauche en France résultait d’une mobilité au sein du groupe HSBC, la cour a inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis ».

A la lecture de cette décision, il apparaît que le salarié impatrié peut être regardé comme ayant été recruté par l’intermédiaire de l’entreprise étrangère pour laquelle il travaillait même s’il a rompu toute relation contractuelle avec elle et même s’il a conclu un contrat à durée indéterminée avec l’entreprise établie en France.

En fait, les éléments qui ont été considérés comme déterminants sont le fait que :

  • le salarié impatrié a été embauché par la société établie en France sans période d’essai
  • la société établie en France a repris l’ancienneté qu’il avait dans l’entreprise étrangère
  • le salarié impatrié avait indiqué lui-même à l’administration fiscale qu’il était venu en France dans le cadre d’une mobilité internationale.

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