08 décembre 2022

Frais d’hébergement temporaire et précaire des salariés : l’absence d’avantage en nature

Me Grégory D'Angela

Une entreprise peut-elle déduire de son bénéfice imposable les frais engagés pour la location d’hébergements temporaires et précaires au profit de ses salariés sans les identifier en comptabilité comme des avantages en nature ?

Dans une décision du 5 décembre 2022 (CE 5 décembre 2022, req. n° 462577, publié aux Tables), le Conseil d’Etat a jugé que seuls les frais engagés pour la location de lieux présentant le caractère de véritables logements constituent des avantages en nature pour les salariés en bénéficiant et doivent donc être identifiés comme tels en comptabilité. A défaut, ils ne sont pas déductibles des résultats de l’entreprise. En revanche, les frais engagés pour la location d’hébergements professionnels à caractère temporaire et précaire ne constituent pas des avantages en nature pour les salariés et n’ont donc pas à être identifiés comme tels en comptabilité.

 

La qualification d’avantage en nature alloué au personnel

La qualification d’avantage en nature :

La décision rendue par le Conseil d’Etat le 5 décembre 2022 est importante en ce qu’elle vient rappeler que la prise en charge par une entreprise des frais d’hébergement de ses salariés n’est pas nécessairement constitutive pour ces derniers d’un avantage en nature.

En effet, elle ne constitue un avantage en nature que si l’hébergement en cause présente le caractère d’un véritable logement.

Tel n’est pas le cas d’un hébergement précaire et temporaire :

« En se fondant, pour refuser la déduction des sommes correspondantes faute de comptabilisation explicite en tant que tels, sur ce que la location de mobil-homes pour les besoins des salariés constituait nécessairement des avantages en nature accordés à ceux-ci, sans rechercher si ces salariés pouvaient, dans les circonstances de l’espèce, être regardés comme bénéficiant de tels avantages du fait de l’occupation, en tout ou partie, de lieux présentant le caractère de véritables logements et non d’hébergements professionnels à caractère temporaire, la cour a commis une erreur de droit ».

En l’espèce, l’entreprise requérante avait engagé des frais de location de mobil-homes, qui étaient partagés dans des conditions précaires et temporaires par plusieurs ouvriers.

La qualification de personnel :

Le personnel s’entend bien évidemment des salariés de l’entreprise mais aussi de ses dirigeants, même si ces derniers ne sont pas liés avec elle par un contrat de travail (pour le gérant de SARL, cf. par exemple : CE 26 décembre 2013 Centaurod, req. n° 359497, publié aux Tables).

  

Obligations comptables et sanctions fiscales en découlant

Obligations comptables :

La qualification d’avantage en nature alloué au personnel entraîne des obligations comptables spécifiques pour l’entreprise. Ainsi, en vertu de l’article 54 bis du code général des impôts (CGI), les contribuables imposables d’après le bénéfice réel ont l’obligation d’inscrire en comptabilité sous une forme explicite la nature et la valeur des avantages en nature accordés au personnel, et ce quel que soit le montant desdits avantages.

Sanctions fiscales :

 Lorsque l’entreprise ne respecte pas ces obligations comptables, les avantages en nature constituent des avantages occultes au sens du c de l’article 111 du CGI.

Ces avantages ne sont alors pas déductibles des résultats imposables de l’entreprise ; ce qui est une sanction très lourde.

Corrélativement, ils constituent pour leurs bénéficiaires des revenus distribués imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.

Le Conseil d’Etat l’a de nouveau rappelé dans sa décision du 5 décembre 2022 :

« 4. Aux termes de l’article 54 bis du code général des impôts : ” Les contribuables visés à l’article 53 A (…) doivent obligatoirement inscrire en comptabilité, sous une forme explicite, la nature et la valeur des avantages en nature accordés à leur personnel “. A défaut du respect d’une telle obligation, les sommes correspondantes constituent des avantages occultes au sens du c de l’article 111 du code général des impôts, imposables entre les mains du bénéficiaire dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers et non déductibles du bénéfice de l’entreprise ».

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