14 octobre 2022

TVA sur la marge et terrains à bâtir : application de la jurisprudence Promialp

Me Grégory D'Angela

Le régime fiscal de la TVA sur la marge est-il applicable à la cession d’un terrain à bâtir issu de la division parcellaire d’un terrain acquis bâti ?

Dans sa décision « BH Concept » très récente du 11 octobre 2022 (CE 11 octobre 2022 Société BH Concept, req. n° 464561, publié aux Tables), le Conseil d’Etat a, faisant application de sa jurisprudence « Promialp », jugé que le régime de la TVA sur la marge n’est pas applicable à la cession d’un terrain à bâtir issu de la division parcellaire d’un terrain acquis bâti :

« 3. Il résulte de ces dernières dispositions, lues à la lumière de celles de la directive dont elles ont pour objet d’assurer la transposition, que les règles de calcul dérogatoires de la taxe sur la valeur ajoutée qu’elles prévoient s’appliquent aux opérations de cession de terrains à bâtir qui ont été acquis en vue de leur revente et ne s’appliquent donc pas à une cession de terrains à bâtir qui, lors de leur acquisition, avaient le caractère d’un terrain bâti, notamment quand le bâtiment qui y était édifié a fait l’objet d’une démolition de la part de l’acheteur-revendeur ou quand le bien acquis a fait l’objet d’une division parcellaire en vue d’en céder séparément des parties ne constituant pas le terrain d’assiette du bâtiment ».

 

L’opération immobilière en litige dans l’affaire BH Concept

L’opération immobilière en litige peut se résumer ainsi :

  • Un terrain servant d’assiette à une construction fait l’objet d’une demande de division parcellaire ayant pour objet de permettre la vente séparée des parties du terrain ne servant pas d’assiette au bâtiment
  • Après l’autorisation de cette demande de division parcellaire, acquisition puis cession des parcelles ne servant pas d’assiette au bâtiment avec application, lors de la cession, du régime de la TVA sur la marge

 

Le rappel de la jurisprudence Promialp

L’article 392 de la Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée limite la possibilité pour les Etats d’appliquer le système de la TVA sur la marge aux « livraisons de bâtiments et de terrains à bâtir achetés en vue de la revente par un assujetti qui n’a pas eu droit à déduction à l’occasion de l’acquisition ».

Dans sa décision « Promialp » du 27 mars 2020 (CE 27 mars 2020 Société Promialp, req. n° 428234, publié aux Tables) que nous avions déjà commentée, le Conseil d’Etat a déduit de ces dispositions de l’article 392 de la Directive TVA que le régime de la TVA sur la marge n’est applicable qu’à la livraison de terrains à bâtir « achetés en vue de leur revente », c’est-à-dire de terrains qui, au moment de leur acquisition, constituent des terrains à bâtir.

La Haute juridiction administrative a ainsi jugé que n’entre pas dans le champ d’application de la TVA sur la marge la cession d’un terrain à bâtir qui, lors de son acquisition, a le caractère d’un terrain bâti. Elle a précisé que cette solution s’applique notamment lorsque le terrain à bâtir procède de la démolition du bâtiment par l’assujetti-revendeur.

 

L’apport de la jurisprudence BH Concept

La jurisprudence « BH Concept » précise, quant à elle, que la TVA sur la marge n’est pas applicable à la cession d’un terrain à bâtir issu de la division parcellaire d’un terrain acquis bâti (division parcellaire ayant pour objet de permettre la vente séparée des parties du terrain ne servant pas d’assiette au bâtiment). L’exclusion du régime de la TVA sur la marge est fondée, là encore, sur le fait que le terrain à bâtir avait, lors de son acquisition, le caractère d’un terrain bâti. Il s’agit donc d’un deuxième cas d’application de la jurisprudence « Promialp ».

Comment apprécier si le terrain en cause avait, lors de son acquisition, le caractère d’un terrain bâti ?

Lorsque la division parcellaire est demandée et autorisée après l’acquisition du terrain, il est bien évident que ce terrain a été acquis bâti puisqu’il a été acquis alors qu’il supportait une construction.

Qu’en est-il lorsque la division parcellaire est demandée et autorisée avant l’acquisition du terrain ? Dans ce cas, la solution est moins évidente. Le Conseil d’Etat indique que les juges du fond doivent vérifier « s’il ressort des actes de vente que les terrains avaient été acquis par la société cédante comme terrains à bâtir, distinctement des terrains supportant des constructions ».

Si tel est le cas, la société cédante doit être regardée comme ayant acquis un terrain présentant bien le caractère d’un terrain à bâtir. La cession ultérieure de ce terrain peut alors bénéficier du régime fiscal de la TVA sur la marge.

Dans le cas contraire, la société cédante doit être regardée comme ayant acquis un terrain présentant le caractère d’un terrain bâti. La cession ultérieure de ce terrain ne peut alors pas bénéficier du régime fiscal de la TVA sur la marge, conformément à la jurisprudence “Promialp”.

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