08 février 2023

Avis de vérification de comptabilité d’une société étrangère

Me Grégory D'Angela

L’avis de vérification de comptabilité d’une société étrangère doit-il obligatoirement être adressé au lieu de son siège situé à l’étranger ?

Dans une décision très récente du 3 février 2023 (CE 3 février 2023 Société Garovito Construções, req. n° 456212, publié aux Tables), le Conseil d’Etat a répondu par la négative. Il a rappelé que si l’avis de vérification de comptabilité doit, en principe, être notifié au siège de la société situé à l’étranger, ce principe est toutefois assorti d’exceptions.

 

Les règles de notification des avis de vérification de comptabilité des sociétés ayant leur siège à l’étranger

Principe : la notification au siège de la société situé à l’étranger :

Le premier alinéa de l’article L. 47 du Livre des procédures fiscales (LPF) dispose que :

« Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d’une personne physique au regard de l’impôt sur le revenu, une vérification de comptabilité ou un examen de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l’envoi ou la remise d’un avis de vérification ou par l’envoi d’un avis d’examen de comptabilité ».

Il résulte de ce texte que l’avis de vérification de comptabilité doit être adressé au contribuable lui-même.

Lorsque le contribuable est une société étrangère, l’avis de vérification de comptabilité doit être adressé à son représentant légal et notifié au lieu de son siège social situé à l’étranger.

Première exception : la notification au mandataire désigné en matière de TVA :

Dans sa décision du 3 février 2023 (CE 3 février 2023 Société Garovito Construções, req. n° 456212, publié aux Tables), le Conseil d’Etat a précisé que lorsque la société étrangère a désigné en France un mandataire à la TVA en application de l’article 95 de l’annexe 3 au code général des impôts (CGI), l’avis de vérification de comptabilité peut être notifié à l’adresse en France de ce mandataire à la TVA.

Toutefois, cet avis de vérification de comptabilité ne permettra à l’administration fiscale de contrôler que le respect par la société étrangère de ses obligations déclaratives en matière de TVA. Cet avis de vérification de comptabilité ne pourra donc pas être utilisé pour le contrôle des autres impôts, notamment de l’impôt sur les sociétés.

« La désignation, en application du III de l’article 95 de l’annexe III au code général des impôts (CGI), d’un mandataire par une société assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) établie dans un autre État membre de l’Union européenne permet seulement à l’administration fiscale de notifier à ce dernier tout ou partie des communications relatives à l’assiette, au recouvrement et au contentieux de la taxe sur la valeur ajoutée, à l’exclusion des communications relatives aux autres impôts dont pourrait également être redevable la société assujettie à cette taxe. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu’une société étrangère exerçant une activité en France s’est bornée à désigner un mandataire en matière de TVA en application du III de l’article 95 de l’annexe III au CGI et que l’administration a seulement fait parvenir l’avis de vérification de comptabilité de la société à l’adresse de ce mandataire, elle ne peut régulièrement tirer les conséquences des résultats de ce contrôle à l’égard de la société qu’en matière de TVA ».

Seconde exception : la notification au gérant de fait :

Dans sa jurisprudence « Rivastella » (CE 23 mars 1992 Société nouvelle Rivastella, req. n° 99425 et n° 99426, publié aux Tables), le Conseil d’Etat avait déjà eu l’occasion de préciser que les opérations de vérification de comptabilité peuvent régulièrement être suivies avec le gérant de fait de la société contrôlée et ce quels que soient les impôts contrôlés (IS, TVA …) :

« qu’en remettant l’avis de vérification non au gérant statutaire de la société mais à M. X… dont il n’est pas contesté qu’il était son gérant de fait et en menant avec celui-ci le débat oral et contradictoire, le vérificateur n’a commis aucune irrégularité nonobstant la circonstance que le jugement du tribunal de grande instance de Créteil condamnant M. X…, en tant que gérant de fait de ladite société, au paiement solidaire d’une partie de l’imposition litigieuse, ne soit intervenu que postérieurement à ladite vérification ».

Dans sa décision du 3 février 2023, le Conseil d’Etat a rappelé ce principe en jugeant que l’avis de vérification de comptabilité d’une société étrangère peut régulièrement être notifié à l’adresse en France de son gérant de fait :

« Toutefois, l’intéressé, associé de la société domicilié en France, assurait la gestion matérielle et technique de l’ensemble de l’activité de cette société, disposait du pouvoir de l’engager auprès des tiers, et avait d’ailleurs ouvert en France, au nom de la société, deux comptes bancaires pour lesquels il bénéficiait seul d’une procuration et sur lesquels étaient versées les recettes issues des chantiers de maçonnerie effectués en France. Dans ces conditions, l’administration a pu, sans entacher la procédure d’irrégularité au regard de l’article L. 47 du LPF, adresser à ce dernier, qui devait être regardé comme le gérant de fait de la société, l’avis de vérification destiné à cette dernière et tirer les conséquences des résultats de ce contrôle à l’égard de celle-ci tant en matière de TVA qu’en matière d’IS ».

 

Application aux faits en litige

La société Garovito Construções est une société dont le siège est situé au Portugal. Elle a fait l’objet en France d’une vérification de comptabilité à l’issue de laquelle l’administration fiscale lui a notifié des rectifications en matière d’impôt sur les sociétés et de TVA.

L’avis de vérification de comptabilité n’a pas été notifié au siège de la société situé au Portugal mais à l’adresse en France du mandataire qu’elle a désigné pour suivre les opérations en matière de TVA.

Or, il se trouve que ce mandataire désigné pour la TVA était également le gérant de fait de la société portugaise.

En sa qualité de gérant de fait, il pouvait se voir notifier un avis de vérification de comptabilité aussi bien en matière de TVA qu’en matière d’impôt sur les sociétés.

Il en résulte que le fait que l’avis de vérification de comptabilité n’ait pas été notifié au siège de la société situé au Portugal n’était nullement de nature à entraîner l’irrégularité de la procédure d’imposition.

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